Que reste-t-il du Parti communiste français ?


Que reste-t-il du Parti communiste français ?:

Le PCF réunit son 38e congrès à Ivry-sur-Seine. Premier parti de Franceà la Libération, décimé par François Mitterrand, le Parti communiste n’a attiré que 2,7 % des électeursaux dernières législatives. Histoire d’une chute.

Du 23 au 25 novembre, le Parti communiste français (PCF) réunit son trente-huitième congrès à Ivry-sur-Seine (Val-d’Oise). Un congrès de crise comme les communistes n’en ont encore jamais traversé en cent ans d’existence, depuis leur fondation, au congrès de Tours en 1920. De premier parti de France à la Libération, le PCF est devenu un parti résiduel. Pour quelles raisons?

Un recul continu depuis quarante ans

Dès les premières années d’existence du PCF, né d’une division de la SFIO au congrès de Tours en 1920, la tension est dans tous les esprits. La crainte est celle d’une possible contagion sur le territoire national de la révolution russe. La classe ouvrière est au centre de toutes les attentions. Depuis le début des années 20, les effectifs de l’industrie et du bâtiment l’emportent sur ceux de l’agriculture. La classe des travailleurs manuels salariés approche les 9 millions. L’expansion communiste se fait de façon efficace au travers d’un tissu associatif de plus en plus maillé. Ce tissu, en premier lieu syndical mais allant aux associations de locataires, de femmes, aux mouvements de jeunesse, sportifs ou en faveur de la paix mondiale, sera une grande force du parti à son apogée.

Les années d’alliance du Front populaire confortent l’implantation initiale. À la fin de 1937, «le PCF pourrait avoir placé entre 260.000 et 290.000 cartes», indique l’historien Roger Martelli – longtemps engagé au PCF – dans Empreinte communiste(LDES). Mais déjà, une tension interne au parti se manifeste entre ouverture et raide opposition de classes. Résolue sur le moment, elle poursuivra le PCF jusqu’à aujourd’hui.

À la sortie de la guerre, la Résistance a renforcé son ancrage militant. Aux municipales de 1947, le ministère de l’Intérieur dénombre 1462 municipalités emportées par le PCF. Loin des 317 de 1937. Aux premières législatives de la IVe République en 1946, le PCF emporte 183 sièges, bien devant la SFIO. Le «parti des fusillés» se croit aux portes du pouvoir. Les intellectuels et artistes jouent un rôle majeur dans l’expansion d’après guerre. Pierre Joliot-Curie, Paul Éluard, Pablo Picasso, Paul Langevin, Francis Jourdain ou Francis Léger sont aux côtés du PCF. Mais, là encore, des tensions naissent, à la suite de l’instauration des régimes communistes en Europe orientale, dans le climat de guerre froide. «La tension entre la doxa stalinienne et la réflexion sur le substrat démocratique français inscrit une zone d’incertitude», indique Martelli. «Pour comprendre la chute du PCF, il faut comprendre ce qui a construit son influence, explique l’historien. Or le PCF a rempli une solide fonction utopique, en plus d’une fonction de représentation sociale et d’une fonction politique.» Cette fonction construite sur «le rêve de la sainte égalité des sans-culottes associé au mythe soviétique» se fissure et se brisera au 20e congrès de 1972…

Après 1953, la détente internationale suivant la mort de Staline offre un répit. Le PCF retrouve ses forces de la fin de la guerre, ainsi qu’une certaine ouverture, contredite par le refus de la direction – jusque dans les années 60 – de la déstalinisation. Pour preuve, le soutien à l’intervention soviétique à Budapest.

En janvier 1956, après la dissolution de l’Assemblée, le PCF récupère son nombre d’électeurs de 1946 et se renforce de 101 à 150 députés. L’Ifop estime alors que le pourcentage d’ouvriers votant communiste tourne autour de 55 %. En 1958 cependant, le secrétaire général Maurice Thorez est pris au piège de la radicalité. Avant le référendum proposé par de Gaulle, il prévient: «Les oui seront des oui au fascisme.» Suit la victoire écrasante du oui à la Constitution de la Ve République. Or ce oui, souligne Martelli, «a attiré une part non négligeable de l’électorat du PC». Aux premières législatives de la Ve, le PCF perd 1,5 million d’électeurs. Les députés passent de 150 à 10.

En 1962, Thorez vire casaque et pour tenter de sauver la mise propose une union de toute la gauche autour d’un programme commun. La démarche porte ses fruits aux municipales de 1965, avec une centaine de communes supplémentaires, dont neuf villes de plus de 30.000 habitants. Le mouvement s’accroît en 1971.

L’arrivée de François Mitterrand à la tête du Parti socialiste en 1971 change cependant la donne, définitivement. Georges Marchais espère que le «programme commun» signé avec lui cette même année relancera le PCF. Ce sera son arrêt de mort. Aux élections suivantes, l’ascension est encore apparente, mais, derrière, le PS prend la main. Aux municipales de mars 1977, les listes sont majoritairement conduites par le PS et les radicaux de gauche. Les socialistes redeviennent la première force à gauche. Pari perdu. Aux législatives de 1978, le PC est encore au-dessus des 20 % (20,6 %), mais au lendemain de la victoire de Mitterrand, il tombe à 16,1 %. Quatre ministres communistes entrent au gouvernement en 1981. Mais, comprenant que l’union de la gauche les étouffe, les communistes quittent le gouvernement lors du remplacement de Pierre Mauroy par Laurent Fabius à Matignon. Mais rien n’arrête l’érosion. Le PC passe sous la barre des 10 % en 1986, puis son candidat à la présidentielle de 1988, André Lajoinie, n’obtient que 6,76 % des voix. La chute du bloc soviétique achève de déstabiliser le PC.

Robert Hue, figure nouvelle après Georges Marchais, offre à nouveau un court répit au milieu des années 90. Et à partir de 2009, l’association avec Jean-Luc Mélenchon au sein du Front de gauche est une bouffée d’oxygène après le score de 1,93 % de Marie-George Buffet en 2007.

Après deux présidentielles communes et malgré les excellents résultats de 2017 (19,58 % des voix pour Mélenchon), le PCF décide de rompre l’union, craignant l’hégémonie du mouvement des Insoumis. Parti seul aux législatives de 2017, il tombe à 2,7 %. Et pour la première fois de son histoire, en vue de son 38e congrès, la direction du parti est mise en minorité et plus ou moins renversée par une liste identitaire. Mélenchon cependant, s’il n’est pas plombé par le passé mortifère du PCF, ne possède pas son ancrage local.

Communisme municipal

En 1927, la droite s’inquiète de l’apparition d’une «ceinture rouge» autour de Paris. «Les adversaires les plus résolus voient la capitale encerclée par 300.000 “moscoutaires” quand le parti y compte au mieux 15.000 adhérents», raconte Martelli. C’est pourtant le début de ce qui fera l’une des forces du PCF durant son siècle d’influence: le communisme municipal. En 1953 déjà, les communistes dirigent 1064 municipalités et détiennent 20.470 conseillers municipaux. En 1977, à son apogée, grâce à l’union de la gauche, 54 communes de la première couronne sont détenues par le PCF. Depuis 1971, Amiens, Calais, Saint-Dizier et Arles ont désormais un maire communiste. Le PCF atteint son apogée en 1977 en décrochant Saint-Étienne, Le Havre, Nîmes, Le Mans…

La politique sociale menée se veut «le premier pas vers la cité idéale où le peuple ouvrier n’est plus souffrant, mais dirigeant», note Martelli. En 1977, les communistes et leurs alliés administraient plus de 8,5 millions d’habitants. Trente ans plus tard, le communisme municipal s’est également effondré, même s’il garde encore 39 communes en Ile-de-France.

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